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Martin Hirsch et la révolution des data

DSIH, @lehalle, MARDI 09 JANVIER 2018

Quatre ans après avoir pris la tête de l’AP-HP, Martin Hirsch a eu « envie de faire découvrir le plus grand hôpital d’Europe ». « Passer par les coulisses, regarder l’envers du décor, décrire la machinerie, tenter d’en faire percevoir l’âme, voilà ce que je souhaite partager grâce à cet ouvrage », écrit-il en introduction de L’Hôpital à cœur ouvert, publié en novembre dernier(1).  

Rempart et repère

Le directeur général de ce « navire amiral du système de santé français », nous conduit à la rencontre des personnels, à la découverte de leurs conditions de travail. Mais c’est surtout un plaidoyer pour l’hôpital public – à la fois « rempart » et « repère » – et une vision de son avenir qu’il cherche à développer dans ces 280 pages. Il en consacre donc une bonne part (un chapitre d’une trentaine de pages) à « la révolution des données » et aux défis qu’il compte bien relever alors que l’AP-HP accueille chaque année 10 millions de patients, une taille qui lui permet de s’engager dans une course de vitesse avec le secteur privé. Convaincu que l’accès aux informations donnera à ceux qui le détiennent « le vrai pouvoir en matière de santé », et inquiet à l’idée que médecins, hôpitaux et industriels du médicament ne se transforment en « sous-traitants » de ces « cerveaux électroniques » couramment désignés par l’acronyme Gafa(2), Martin Hirsch rappelle que l’AP-HP met actuellement en place un entrepôt de données ainsi qu’une plateforme de séquençage génétique(3).

Alternative aux entrepôts commerciaux

Cet entrepôt contribue à « donner tout son sens au groupe que nous formons, une communauté de confiance au service du patient », insiste-t-il, militant pour que la sphère publique, respectant des règles éthiques strictes, offre une alternative aux entrepôts commerciaux. Cela ne l’empêche pas, comme il le raconte, d’ouvrir la porte de son bureau au PDG de Verily(4) ou de discuter avec la patronne d’IBM. Mais il reste ferme sur des positions protectionnistes. D’autant plus qu’il apparaît persuadé que l’AP-HP a « la capacité de faire tourner les technologies de l’IA en autonomie, sans avoir besoin de faire confiance à une boîte noire(5) ». Il ne manque pas de s’interroger sur les nombreux défis éthiques qui accompagnent les avancées scientifiques liées à l’exploitation des données de santé, notamment génétiques. Mais il veut être confiant dans l’idée que médecins et établissements de santé sauront mettre les garde-fous nécessaires… alors qu’il n’est pas certain que « d’autres acteurs ayant accès à ces technologies aient les mêmes scrupules, les mêmes réserves ».

L’ancien patron d’Emmaüs conforte avec cet ouvrage son image d’humaniste, attaché à des valeurs et à des principes irréprochables. Il n’évacue toutefois pas les dysfonctionnements et le malaise auxquels il est régulièrement confronté, avançant même quelques pistes pour y répondre.


(1) Éditions Stock.

(2) Google, Amazon, Facebook, Apple.

(3) Avec ses partenaires d’Unicancer.

(4) Filiale santé d’Alphabet, la maison mère de Google.

(5) En référence au système Watson d’IBM.

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