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Digitalisation de l’orthopédie : de nombreux bénéfices, mais un manque criant de financement

DSIH, Damien Dubois, LUNDI 16 NOVEMBRE 2020

L’arrivée d’outils innovants en orthopédie améliore la précision à toutes les étapes, aussi bien en préopératoire qu’au bloc et durant le suivi. Vendredi 6 novembre, lors du « Rendez-vous avec l’orthopédie » du Snitem[1], leurs bénéfices ont été soulignés au même titre que les difficultés de valorisation et de financement qui leur sont associées.    

Les dispositifs médicaux digitaux ont transformé la chirurgie orthopédique. Par exemple, la planification de l’opération intègre aujourd’hui les avancées en imagerie, grâce à la personnalisation des prothèses et de leur pose, grâce également à l’utilisation de bras robotisés et de systèmes de navigation. L’intelligence artificielle (IA) est d’ailleurs identifiée comme un atout dans cette intégration : autonomisation des robots, diminution de la taille des systèmes de navigation, amélioration de la planification en un clic et optimisation du temps du chirurgien.

Une réduction du taux d’échec de 50 % à cinq ans

Pour les experts intervenant lors de ce rendez-vous, la chirurgie orthopédique entre dans l’ère du sur-mesure, avant, pendant et après l’acte chirurgical lui-même.
« À partir du scanner et des vues 3D de l’épaule, le chirurgien travaille avec cet outil de planification sur la taille de l’implant et son implantation virtuelle, puis il obtient un guide patient spécifique pour poser l’implant », exemplifie le Pr Pascal Boileau, chef du service de chirurgie orthopédique et du sport à l’hôpital Pasteur 2 de Nice. Il a travaillé, avec une start-up française, sur un logiciel de planification, « avec à la clé, une précision augmentée au niveau de l’implant lui-même et de sa pose ».
Au-delà de la précision de l’information et du geste, la digitalisation permet un entraînement du geste avant l’opération et facilite non seulement le suivi du patient, avec des outils d’enregistrement, mais aussi sa récupération. Le bénéfice chiffré, sur le plan mondial, affiche une diminution de 50 % du taux d’échec à cinq ans selon le Pr Sébastien Lustig, chirurgien orthopédiste, chef du département de chirurgie prothétique à l’hôpital de la Croix-Rousse des Hospices civils de Lyon.

La nécessaire évolution de l’enseignement

Ces innovations impliquent des changements de pratique, notamment en amont de l’opération avec une préparation personnalisée : planification, imagerie, commande de la prothèse, échanges avec les ingénieurs… Ce temps logistique et pratique et ces compétences d’ingénieur doivent être intégrés dans l’enseignement de la chirurgie ; une nécessité pour la diffusion du digital, alors que la majorité des chirurgiens continue à utiliser des techniques mécaniques. Selon le Dr Jean-Pierre Piton, chirurgien orthopédiste à l’hôpital Belle-Isle de Metz, « la navigation doit être reconnue au niveau de l’enseignement de la chirurgie. Elle permet de définir le centre de rotation, l’orientation de l’implant, la taille de la tige, la mesure du piston… On diminue ainsi les aléas peropératoires et les complications postopératoires ».

Des freins réglementaires et financiers

Le Dr Marc-Olivier Gauci, président de CAOS-France, a réalisé un tour d’Europe de l’intégration de la digitalisation en santé et constaté que la France était dans la moyenne. Les freins identifiés portent sur le manque de visibilité et d’interopérabilité, une réglementation contraignante, des mentalités encore peu ouvertes à la digitalisation et le manque de financement.

À cet égard en effet, les discussions ont mis en avant l’impossibilité de financer les solutions digitales utilisées exclusivement par les professionnels de santé par la LPPR (liste des produits et prestations remboursables) ou via les expérimentations prévues à l’article 51 de la LFSS, contrairement aux applications utilisées par les patients ou encore le suivi postopératoire. Ces solutions digitales restent donc du ressort du budget des hôpitaux. Face à ce constat, Isabelle Adenot, présidente de la Cnedimts, a regretté que la HAS n’ait pas pour mission d’évaluer les logiciels utilisés par les professionnels de santé. Cependant, « la HAS publiera dans les prochains jours les règles d’évaluation et de valorisation de l’impact organisationnel des technologies de santé dont les dispositifs médicaux », a-t-elle indiqué. Face à l’identification de ces enjeux, le Snitem a mis en place un groupe de travail sur les questions d’accès au marché des solutions digitales pour proposer des approches concrètes et alternatives.


[1] Replay du Rendez-vous avec l’orthopédie : https://bit.ly/2GJ1hed

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