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Entrepôts de données de santé : Synthèse et enjeux

DSIH, LUNDI 02 OCTOBRE 2023

Retour sur l’intervention de Me Alexandre Fievée lors du Salon-Congrès City Healthcare à la Cité des congrès de Nantes

Les 21 et 22 septembre 2023 s’est tenu le Salon-Congrès City Healthcare à la Cité des congrès de Nantes, consacré au numérique en santé. Cette 8e édition, organisée sous le haut patronage du ministre de la Santé et de la Prévention, était présidée par le Dr Lise Alter, directrice générale de l’Agence de l’innovation en santé.

Au cours de ces deux journées entièrement dédiées au numérique en santé au travers de ses usages, plus de 140 experts et 70 exposants ont répondu présent. 40 tables rondes, conférences et workshops se sont tenus.

La thématique de l’une des tables rondes portait sur les entrepôts de données de santé (EDS). Plusieurs experts étaient réunis pour répondre aux questions suivantes : Pourquoi les entrepôts de données de santé sont-ils appelés à devenir de formidables outils de soins et de recherche ? Quel est leur impact direct sur les patients ? Par ailleurs, un focus a été réalisé sur le projet lauréat de l’appel à projets soutenu par France 2030 « ODH 2.0-GCS Hugo », à travers une illustration par cas d’usage.

Étaient présents les experts Caroline Dorphin (en charge des partenariats au sein du Health Data Hub), Me Delphine Ganoote Mary (avocate au barreau de Nantes et spécialiste du droit de la propriété intellectuelle, des nouvelles technologies, de l’informatique et de la communication), Fanny Gaudin (directrice de la recherche et de l’innovation au CHRU de Brest et déléguée générale du GCS Hugo), le Pr Marc Cuggia (médecin, professeur d’informatique médicale à l’université de Rennes 1 et directeur de l’équipe projet « Données massives en santé » à l’UMR Inserm 1099 LTSI – Laboratoire de traitement du signal et de l’image), le Pr Pierre-Antoine Gourraud (professeur des universités, praticien hospitalier au CHU de Nantes et responsable depuis 2018 de « La clinique des données », un nouveau service hospitalier dédié aux données générées par le soin au CHU de Nantes) et, enfin, Me Alexandre Fievée (avocat au sein du cabinet Deriennic Associés, spécialiste, entre autres, de l’innovation et des données, notamment dans le domaine de la santé).

Me Alexandre Fievée a accepté de revenir sur cet événement.

De manière très simple, qu’est-ce qu’un EDS ?

Un EDS peut être défini, en termes simples, comme la mise en commun des données d’un ou plusieurs systèmes informatiques médicaux, sous un format homogène, en vue d’une exploitation à d’autres fins, en principe, que celle pour laquelle elles ont été collectées. Les données intégrées sont principalement des données administratives de patients et des données de santé (diagnostiques, de biologie, etc.). Ces données initialement collectées pour un usage primaire, c’est-à-dire dans le cadre de la prise en charge des patients, sont réutilisées pour d’autres finalités, telles que la recherche, mais aussi la production d’indicateurs d’activité pour le pilotage ou la qualité des soins. On parle d’une utilisation secondaire des données. Si les premiers EDS ont été conçus notamment pour optimiser le codage hospitalier à des fins de facturation, leur constitution a désormais pour finalité principale la recherche scientifique.

Existe-il un cadre juridique spécifique à l’EDS ?

D’un point de vue réglementaire, il convient de distinguer les règles en vigueur au titre de la constitution de la plateforme de celles qui sont applicables au cadre strict de la recherche.

S’agissant de la constitution de la plateforme, il est nécessaire de se rapporter au référentiel de la Cnil de 2021 qui énumère un certain nombre d’exigences en termes notamment de finalités, de règles de gouvernance, de gestion des droits d’accès, d’information des patients ou encore de sécurité. Si l’EDS entre dans le cadre de ce référentiel, une simple déclaration de conformité à la Cnil suffit. Dans le cas contraire, une demande d’autorisation à l’autorité de contrôle doit être déposée.

La réutilisation des données de santé à des fins de recherche doit en revanche être autorisée par la Cnil, sauf si elle s’inscrit dans le cadre d’une méthodologie de référence élaborée par la Commission. Dans ce dernier cas, un simple engagement de conformité à cette méthodologie suffit.

Combien dénombre-t-on d’EDS en France ?

Il est à relever que ce cadre réglementaire, qui pourrait s’apparenter à une contrainte, n’a pas fait obstacle au développement des EDS sur le territoire national. Un grand nombre d’EDS a en effet vu le jour ces dernières années. On peut dire que cet écosystème est en « pleine construction » ou encore « en pleine expansion », pour reprendre les termes de la Haute Autorité de santé.

Il y a un an, on pouvait dénombrer plus de 30 CHU dotés d’un EDS, ce à quoi il faut ajouter toutes les autres structures de soins qui se sont également lancées dans une telle démarche.

Quels sont les facteurs qui ont contribué au développement des EDS ?

Cet écosystème a bénéficié incontestablement d’une accélération grâce à :

  • des financements nationaux ;
  • la multiplication d’acteurs industriels spécialisés en données de santé ;
  • une réflexion supranationale à propos de l’espace européen des données de santé.

Quels sont les enjeux de demain ?

Si cet écosystème est en « pleine expansion », il est également, pour certains, « sous-exploité » en raison d’un financement insuffisant.

Pourtant, tout le monde s’accorde aujourd’hui à considérer que les données de santé détenues par les hôpitaux, les laboratoires d’analyses médicales et les professionnels de santé peuvent être déterminantes pour le développement de la recherche et de l’innovation en santé. D’un point de vue économique, les enjeux sont également considérables : une étude récente nous apprend que l’exploitation des données de santé représenterait un gain d’environ 7,3 milliards d’euros par an pour l’économie française.

Mais, selon le Health Data Hub, le financement actuellement consacré aux EDS est insuffisant pour favoriser leur pleine expansion. Il estime qu’une enveloppe globale annuelle de 60 à 90 millions d’euros serait indispensable pour le développement d’un réseau de 30 EDS de taille critique.

Peut-on dire [il s’agissait de l’une des questions posées dans le cadre de la table ronde] que les entrepôts de données de santé sont appelés à devenir de formidables outils de soins et de recherche ?

Absolument. Les EDS sont de formidables outils pour l’amélioration de la qualité des soins, de la recherche et de l’innovation. Mais encore faut-il que les financements suivent. Ces plateformes représentent incontestablement l’avenir, et leur développement va dans le sens des réflexions actuelles avec la création annoncée d’un espace européen des données de santé.

Quel serait le mot de la fin ?

N’oublions pas le patient. Il s’agit, avec le financement, d’un enjeu majeur. Maintenir la relation de confiance entre le corps médical et les patients est primordial, ce qui passe par un véritable effort pédagogique pour expliquer aux patients les finalités d’un EDS et les objectifs de l’utilisation secondaire de leurs données. Il faut aussi leur rappeler qu’ils ont des droits et que les mesures nécessaires nécessaires ont été mises en œuvre pour garantir la sécurité de leurs données.

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