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Implant files : l’Europe à la rescousse ? (Partie 2)

Me Omar Yahia, MARDI 04 DéCEMBRE 2018

En fait de dispositifs médicaux, l’histoire semble être un éternel recommencement.  

Que l’on songe à l’affaire américaine des stérilets Dalkon Shield, dispositifs intra-utérins à l’origine de graves complications chez plus de 200.000 femmes (dont une vingtaine sont décédées). Ces faits se sont déroulés dans les années 70 et ont donné lieu à une class action(action de groupe) de grande ampleur qui a abouti à une transaction de plus de 2,5 milliards de dollars. 

Fondé sur les articles 114 et 168 du Traité fondateur de l’Union européenne, le règlement UE 2017/745 a pour objet d’établir un statut relatif à la mise sur le marché des dispositifs médicaux au sein de l’UE. Ce texte opère une distinction entre trois catégories de dispositifs : les dispositifs implantables (ex : prothèses mammaires), les dispositifs invasifs (ex : sondes) et les dispositifs actifs (ex : logiciels). 

Il ajoute également les réactifs parmi les éléments matériels de la définition du DM, laquelle repose sur deux critères essentiels : la finalité et le moyen. Il doit s’agir d’un moyen de nature physique, le plus souvent mécanique, associé le cas échéant à une source d’énergie, pour une finalité médicale précise.

Le règlement apporte des modifications concernant les règles concernant en particulier le marquage CE (clé de voûte de la réglementation des DM), la mise sur le marché et la mise en circulation des DM, la traçabilité, la classification, l’évaluation de la conformité, l’évaluation et les investigations cliniques, la vigilance. 

S’ils conservent leurs obligations originelles (conception et fabrication des DM conformes, élaboration d’une documentation technique, maintien de la conformité), les fabricants se voient imposer de nouvelles obligations en matière d’évaluation clinique. Ils doivent disposer d’une personne qualifiée chargée de veiller au respect de la réglementation (conformité des produits, établir et mettre à jour la documentation technique et la déclaration de conformité, surveillance post-commercialisation et matériovigilance) et chargée de faire le lien avec les autorités compétentes en cas de contrôles ou d’investigations. 

S’ajoutent également des obligations liées à l’apposition obligatoire du système d’identification unique (UDI) - c’est-à-dire une série de chiffres ou de lettres créée selon les normes internationales d’identification et de codifications des dispositifs  et qui permet l’identification formelle de dispositifs donnés sur le marché - qui devra être enregistrée dans la base de données EUDAMED, sur tous les dispositifs médicaux et dont il appartiendra à chaque opérateur économique successif d’en vérifier le respect.

Désormais, si une autorité compétente considère ou a des raisons de croire qu’un dispositif a causé un dommage, « elle facilite la communication, sur demande, des informations et des documents (…) au patient ou à l’utilisateur ayant potentiellement subi un dommage et, le cas échéant, à son ayant droit, à sa compagnie d’assurance ou à d’autres parties tierces concernées par le dommage causé au patient ou à l’utilisateur ». 

Cette disposition impose aux autorités compétentes de remettre aux utilisateurs finaux qui le demandent, tout document utile sur le dispositif litigieux.

En ce qui concerne les fabricants qui ne sont pas établis dans l’Union européenne, le mandataire (dont la désignation est dans ce cas obligatoire) joue un rôle crucial en ce qu’il veille à la conformité des DM produits par ces fabricants. Il leur sert d’intermédiaire dans l’UE. 

Si, malgré un mandat écrit, le fabricant ne peut déléguer ses propres responsabilités sur son mandataire, ce dernier endosse toutefois un certain nombre d’obligations qui font de lui une sorte de sentinelle de la conformité UE vis-à-vis des autorités, quitte pour ce dernier à mettre un terme à son mandat dans l’hypothèse où le fabricant ne respecterait pas les obligations issues du règlement. Une substitution de mandataire reste possible sous certaines conditions.

Le règlement prévoit une responsabilité solidaire du mandataire et du fabricant en cas de défectuosité des DM, le mandataire étant « juridiquement responsable des dispositifs défectueux au cas où un fabricant établi en dehors de l’Union n’a pas satisfait à ses obligations générales ».

Reste à aborder les rôles respectifs de l’importateur et du distributeur pour finir par évoquer les conditions de surveillance des organismes certificateurs. Ce sera l’objet du volet n°3 de cet article. 


L'auteur  

Par Me Omar YAHIA
Avocat co-fondateur de YAHIA Avocats
Barreau de Paris 
contact@yahia-avocats.fr 

 

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